
HISTOIRE ET DEMARCHE PERSONNELLE
Ce qui reste constamment en fond dans mon travail c’est l’écart prit sur le réel. La vitalité se loge dans cette tentative toujours renouvelée de saisir ce qui ne peut se dire. En cela l’usage que j’ai toujours fais de la peinture est autobiographique. Je la personnalise. Elle me concerne, me structure, me rassure autant qu’elle me malmène.
Des personnages, des bouts de soi plus ou moins figuratifs, des paysages imaginaires.
Si longtemps j’ai attendu que la matière se révèle sous mes mains, sans savoir à l’avance ce que ça donnerait ; depuis plusieurs années je mets des bords à la création. Un thème, une idée, traverse dès le départ et laisse des impressions. Avide des formations de l’inconscient, de ce qui râte, ce qui échappe, j’ai toujours tenté d’en traduire quelque chose dans mes touches et mes traits.
C’est pour ce moment où le corps reprend ses droits et où la forme apparaît d’elle-même, un instant, fugace, où ça se fait tout seul.
Mon langage artistique a longtemps était concentré sur la peinture, la matière vivante. Aujourd’hui la peinture ne m’a pas quitté mais se croise avec le dessin. Il s’agit d’une création en atelier uniquement, un espace bouclé, réduit qui n’en appelle qu’à ma solitude.
Mes premières années de création s’affirmaient tout en explosion pulsionnelle, la touche était généreuse, spontanée, en réalité de corps : la souplesse de l’acrylique à même la main et pastel gras. Un travail avec l’accident, l’apparition de formes, le hasard des lignes. Puis la seconde période pour moi était un rappel à la technique avec pastel sèches, fusain, acrylique et encre, au pinceau et ponctuellement aux mains. Mon travail a évolué vers plus de figurations. Les touches sont mesurées, toujours récit auto-biographique.
Les créations sont autant d’histoires et de témoignages d’instants. Une intimité qui fait sublimation et qui allège. Si ma pratique de psychanalyste et psychologue s’irrigue probablement de ce mouvement, elle ne voit qu’en fragments. La parole a ses limites et l’expression artistique la devance toujours comme Jacques Lacan le soutenait. Cette expression fut la première à naître chez moi, l’origine du pas de côté sur le vécu. C’est ici que quelque chose d’identitaire et de singulier s’est forgé. Des personnages, des bouts de soi plus ou moins figuratifs, des paysages imaginaires.